Cinémascope #1 : Bref.2, The Apprentice, Severance…4 minutes restantes
🎬 Cinémascope • 1
Bienvenue dans le premier article de « Cinémascope » ! Cette section a pour objectif de partager mes découvertes culturelles et mes coups de cœur, avec un focus particulier sur le septième art. Zé parti.
Severance (série)
2022 ‧ Drame, Thriller ‧ Créée par Dan Erickson ‧ Origine : Etats-Unis ‧ 2 saisons
Synopsis
Mark Scout travaille pour Lumon Industries, où il dirige une équipe dont les employés subissent une opération chirurgicale de séparation entre leurs souvenirs liés à leur vie professionnelle et ceux liés à leur vie privée. Cette expérience risquée de l’équilibre entre travail et vie personnelle est remise en cause lorsque Mark se retrouve au cœur d’un mystère qui le forcera à affronter la vraie nature de son travail… et la sienne.
Mon avis
Pour moi, c’est clairement ce qui se fait de mieux en série actuellement. Avec à Hadrien, on se disait que ça faisait une éternité qu’on n’a pas eu ce plaisir de théoriser après chaque épisode. Aujourd’hui, trop de scénarios sont calibrés pour la rentabilité. Résultat : des productions interchangeables, sans âme ni prise de risque, et quand un twist pointe le bout de son nez, il relève plus du « ta gueule, c’est magique » que d’une véritable construction narrative. Severance, elle, prend le contre-pied total de cette tendance, et ça fait un bien fou.
Là où tant de productions modernes s’alignent sur des formules rassurantes pour plaire au plus grand nombre, Severance ose emprunter un chemin bien plus audacieux. Elle dissèque le monde du travail, livre une critique acérée du capitalisme, de son absurdité et de l’égoïsme qu’il engendre, tout en explorant des thèmes profonds comme l’identité et les limites de la conscience.
Visuellement, la série est tout aussi marquante. Le production design est impeccable, et la direction artistique sublime les couloirs labyrinthiques et aseptisés de Lumon. Ajoutez à cela la bande-originale de Théodore Shapiro, et vous obtenez une œuvre qui ne ressemble à aucune autre.
Bien sûr, une idée brillante ne suffit pas à faire du bon cinéma : encore faut-il une écriture à la hauteur. Et c’est là que Severance excelle. La série refuse la facilité et construit un récit exigeant. Les personnages sont complexes, leurs motivations ambiguës. L’intrigue est lente, mais parfaitement maîtrisée pour nous tenir en haleine.
Notons le cast magistral, qui tire Severance vers le haut, y compris ses personnages secondaires. Adam Scott livre une performance saisissante en employé brisé, Patricia Arquette impose une présence glaçante, John Turturro et Christopher Walken apportent de la douceur. Tramell Tillman en Mr. Milchick me donne envie de claquer ma dem’ illico Macias.
📌 Hé, je ne suis pas totalement snob. J’avoue avoir un faible pour les ressorts narratifs éculés des comédies romantiques. J’enchaîne ces films comme on s’enroule dans un plaid un soir d’orage : parce que c’est rassurant, prévisible, et que ça fait du bien. Plonger dans un schéma connu, formaté, c’est s’offrir une histoire où l’on sait que chaque rebondissement mènera à une fin heureuse. C’est du réconfort à la demande, un shot de bonheur instantané.
Mais quand je regarde du cinéma, du « vrai », je veux qu’il m’emporte, qu’il me secoue, qu’il me donne quelque chose de grand, d’inattendu, qui me laisse hantée bien après le générique.
Oh, et Ben fucking Stiller est aux commandes. Oui, l’acteur de Tonnerre sous les tropiques ! Producteur et réalisateur de plusieurs épisodes, il orchestre avec brio les ruptures de ton, jonglant entre angoisse et humour noir, sarcasme et critique. Il pousse l’absurde dans ses derniers retranchements sans jamais diluer la sève sombre de la série.
Autrement dit, Severance, c’est su-per ! Une vraie bouffée d’air frais dans un paysage audiovisuel saturé de produits formatés.
Bref.2 (série)
2025 ‧ Drame, Comédie ‧ Créée par Kyan Khojandi, Bruno Muschio ‧ Origine : France ‧ 2 saisons
Synopsis
Ça y est, il a 40 ans. Et le constat est amer : À force de non-choix et de ne jamais réellement se prendre en main, il se retrouve encore et encore à la même place, en galère de thunes, sans copine et sans travail. Un énième retour à la case départ qui va enfin le motiver à réagir, à se prendre en main et à écouter quelqu’un d’autre que la voix dans sa tête.
Mon avis
Les retours comme celui de Bref, c’est quitte ou double. Soit on relance la machine à billets, en surfant de façon éhontée sur la nostalgie, soit on revient après une décennie avec des idées mûries, prêtes à être mises en scène. Et contre toute attente, Bref.2 s’inscrit dans cette seconde catégorie.
Kyan Khojandi et Navo ont pris de la bouteille, et ça se sent. Plutôt que de recycler, ils réinjectent leur formule culte dans les affres de la quarantaine. La voix off, l’autopsie du quotidien, la lose permanente : tout ce qui faisait le sel de Bref est là, et ça fonctionne toujours. Mieux encore, la mise en scène atteint un « niveau Grand Maître ». On découvre le plaisir de la profusion visuelle, dans une veine proche de Jean-Pierre Jeunet (Amélie Poulain), où l’écriture et l’image s’enrichissent mutuellement pour construire une narration intime.
Alors oui, parfois ça flirte avec le podcast de développement personnel, et le point de vue reste assez privilégié, ce qui peut déconnecter de certaines réalités. Et puis, il y a cet ending, doux et sucré, qui laisse un petit goût de Nutella : réconfortant, mais peut-être un poil trop lisse. Malgré tout, passer du gag aux larmes en un claquement de doigts, c’est un talent rare. Chapeau bas.
The Apprentice (Film)
2024 ‧ Biopic, Drame ‧ Créée par Ali Abbasi ‧ Origine : Canada, Danemark, Irlande, États-Unis
Synopsis
Véritable plongée dans les arcanes de l’empire américain, The Apprentice retrace l’ascension vers le pouvoir du jeune Donald Trump grâce à un pacte faustien avec l’avocat conservateur et entremetteur politique Roy Cohn.
Mon avis
Un film loin d’être feel-good, qui glace le sang tant il résonne atrocement avec l’actualité.
Comme l’indique son titre, The Apprentice retrace l’ascension de Donald Trump, un président bien moins self-made-man qu’il ne le prétend. À ses débuts, il est épaulé par Roy Cohn, avocat charismatique aux méthodes douteuses, qui façonnera le futur magnat du capitalisme, des années 70 à 80. Une plongée sans concession dans les coulisses d’un système décadent, prêt à toutes les bassesses pour prospérer.
Sebastian Stan, qui campe Trump jusqu’aux moindres tics – y compris cette moue caractéristique et insupportable en « bec de canard » – a l’intelligence de ne pas tomber dans la caricature facile. Jeremy Strong, lui, compose un Roy Cohn froid et méthodique. Le duo fonctionne à merveille, révélant une relation mentor-disciple teintée d’endoctrinement insidieux.
Dans sa construction, le film reste assez classique. Paradoxalement, il livre une fiction plus édulcorée que la réalité elle-même – bigger than reality, comme ils disent. Résultat : un récit qui effleure la brutalité de son sujet sans jamais s’y abandonner totalement. Une prudence qui pourrait s’expliquer par la peur d’éventuels procès en diffamation. Reste une œuvre qui, malgré tout, laisse pantois.e face à la monstruosité du personnage.
Laisser un commentaire